Anne Dufourmantelle, Intelligence du rêve

Fantasmes, apparitions, inspiration Payot, 2012, 174 pages, 13,50€

Cabinet de lecture : Annik Bianchini nous donne son avis

Psychanalyste, membre du Cercle Freudien et du Salon Œdipe, journaliste, Annik Bianchini Depeint collabore à “Actualité en France”, la revue d’information du ministère des Affaires étrangères et européennes. Elle a enseigné au Centre culturel français de Rome. Ses publications sont orientées, par priorité, sur les auteurs et les événements alliant connaissance et recherche, dans le domaine de la psychanalyse et des sciences humaines.

“L’interprétation du rêve est la voie royale menant vers l’inconscient”, écrivait Freud. “Rêver est une  promesse” propose la psychanalyste et philosophe Anne Dufourmantelle.

Cet essai veut célébrer l’intelligence du rêve, pris dans un sens presque platonicien, qui serait une intelligence du monde, que l’on se donne à soi-même, que l’on écoute dans la nuit, et qui permet de nous ouvrir à l’imaginaire et à la parole, d’une autre façon. Pour cela, Anne Dufourmantelle s’interroge sur toutes les dimensions du rêve, mais également du fantasme et du corps amoureux dans ce qu’ils révèlent de notre désir.

Le rêve est le reflet de notre intelligence, il obéit à sa grammaire, il a un réel pouvoir et porte une véritable promesse. “N’est-ce pas l’intelligence du rêve qui fait ressembler notre vie consciente au pas de l’aveugle le long d’une falaise ?”, remarque l’auteur.

Le rêve renvoie à une capacité de perception bien plus vaste que le moi, capable de  
nous informer sur le réel.  “Il est cette échappée, le temps d’une nuit, qu’aucune puissance au monde ne peut empêcher”.

Lieu d’une possible métamorphose de soi, le rêve est créateur. C’est un message que le rêveur doit être capable d’entendre. Il est le signe que quelque chose a eu lieu. “Il est le révélateur parfois dramatique, parfois merveilleux, mais souvent inquiétant, de ce qui commence à venir se faire présent à nous-mêmes”.  

“Un rêve non déchiffré est comme une lettre qui vous est adressée et que vous n’ouvrez pas”, dit le Talmud.. Mais un rêve que l’on se remémore, même non interprété, agit, a une puissance d’action. Il rend poreux le rapport entre le dedans et le dehors. “Il vous enseigne à s’avancer vers cette ligne de front où la guerre fait rage … Il met à nu les combats larvés, l’angoisse térébrante, il expose l’hypocrisie des renoncements, les compromis redoutables de la névrose, démasque et tourne en dérision nos désertions”.

Anne Dufourmantelle rapproche également le rêve de la  figure symbolique de l’ange poétique et du daimon, messagers de la parole comme l’est le rêve de notre plus intime et secrète intimité. “On ne croit ni au génie ni aux anges mais on leur parle, on se parle comme si en soi quelqu’un d’autre veillait. Par la voix du génie ou de l’ange comme par la voix du songe, le sujet s’adresse à lui-même comme depuis une orbite éloignée. Il est alors “inspiré”. 

Un rêve, c’est une image, c’est un récit. C’est une parole sans cesse réinterprétée. Le rêve agit au niveau du langage, du son. Il peut jouer sur plusieurs langues, s’inscrire sur plusieurs cultures.  Certains rêves, même, touchent à l’universel. “Mais peut-être rêve-t-on à la seule fin d’éprouver cela : être survivant.”

Que peut le rêve ? : “Réparer, se remémorer, prophétiser, écouter, mettre en garde, terroriser, apaiser, dévoiler, libérer. Et nous permettre d’oublier”.

Annik Bianchini

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