Annik Bianchini nous donne son avis Annie Franck « Beautés et transfert »

Hermann Psychanalyse 2007, 108 p., 16€

 

Dans ce livre, Annie Franck nous fait entrer dans son cabinet  pour y partager l’expérience, à la fois surprenante et émouvante, d’une analyste au travail.
Nulle intention ici de démontrer quoi que ce soit. Ni de soumettre à un examen plus ou moins minutieux une quelconque hypothèse préétablie. Le projet consiste à chercher à transcrire l’expérience chaque fois déroutante des instants où le transfert se transforme en création et révèle un nouvel espace d’où surgit la beauté. “ Dans une analyse, la beauté surgit sans prévenir, présente au milieu de la phrase d’un patient”, commente l’auteur. “Je me trouve tout à coup saisie, les yeux subitement embués, surprise d’être aussi saisie : un patient a parlé et sa parole nous a soudain transportés tous deux plus loin, à l’écart de la seule répétition de sa souffrance…

La beauté de cet instant, de cette lumière tout à coup révélée me transperce…” Mais d’abord, qu’est-ce que la beauté ? Est-ce la perfection : celle-ci ne ferait alors que pétrifier; suspendre toute progression dans un temps arrêté. La beauté, au contraire, explique l’auteur, saisit et mobilise le mouvement pulsionnel. Annie Franck exerce la psychanalyse à Paris. Docteur en psychopathologie fondamentale et en psychanalyse, elle est chargée d’enseignement à l’université Paris VII. C’est à partir de l’analyse de deux patients qu’elle cherche à saisir les moments d’apparition de la beauté, puis le mode de transfert qu’elle installe. Je m’arrêterai à cet instant essentiel, observe-t-elle, où Hugo a dit : “Je me suis retrouvé face au canon du revolver pointé sur mon visage, et le type m’a dit : «couche-toi !»…Je ne me suis pas couché; il se trouve que je ne me suis pas couché”. “La densité de cette phrase m’amène à intervenir, saisissant que derrière ces mots, tout un monde est présent. Toute une histoire est immédiatement là, actualisée. «Oui, exactement. Toute la question pour moi est : pourquoi je ne me suis pas couché. C’est l’essentiel», résume Hugo. Tant pour Hugo que pour Lucien, il s’est agit de découvrir, dans le transfert, le poids de vérité porté par la parole grâce à l’émotion soudaine révélée. Et de maintenir présente en eux la parole de René Char : “Dans nos ténèbres, il n’y a pas une place pour la Beauté, toute la place est pour la Beauté”.

Laisser un commentaire

Your email address will not be published.