Cabinet de lecture : Annik Bianchini nous donne son avis |
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“Pourquoi me demandes-tu ce que tu ne veux pas que je te donne ? – Je demande des choses sans savoir ce que je veux vraiment. Si tu réponds à ma demande, je saurai que ce n’est pas ce que je désire. – Il faut donc que je devine le désir que recouvre ta demande. Mais je ne suis pas sûr que cette demande s’adresse à moi”. Dans le présent ouvrage, le psychanalyste René Major se réfère à Melville et sa nouvelle “Bartleby le scribe” qui, à chaque fois que son patron l’associe à une autre tâche, répond invariablement : “Je préférerais ne pas” (Il would prefer not to). Plutôt qu’une stratégie de l’évitement, “l’art de ne pas” est ici une manière d’éprouver la puissance. Dans un régime démocratique, les leaders politiques ont l’art de paraître répondre à toutes les demandes telles qu’elles sont formulées, sans répondre pour autant à la véritable attente que recouvrent ces demandes. L’élu essaie de donner ce qu’il n’a pas au citoyen, qui ne peut que lui répondre “ce n’est pas ce que je veux”. Pour le psychanalyste, s’il ne refuse pas, il préfère, en revanche, ne pas répondre à cette demande comme telle et cherche plutôt à relancer la question pour comprendre le sens de la demande. Tout en sachant que dans toute demande, il y a l’au-delà de ce qui est demandé. La personnalisation des débats dans la sphère politique, la mise en scène de la vie privée, le pragmatisme politicien qui déstructure le politique, la question du pouvoir qui hante tout rapport à l’autre, le réductionnisme génétique, l’obsession d’une volonté de transparence qui traque tout secret (pour en produire davantage) sont autant de thèmes traités dans cet ouvrage. Annik Bianchini |
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