Christian Fierens Le principe de jouissance

Critique de la raison pratique (Kant) Kant avec Sade (Lacan) Collection : Lire en psychanalyse Editions L'Harmattan

Pierre Boismenu,
Psychanalyste, membre du Cercle Freudien. Livres publiés. Sur le point de savoir (Ed William Blake), L’avérité de la lettre (Ed Le bois de l’Autre), Corps sexuel transmission (Ed Le bois de l’Autre). Il y a aussi des articles de revues. Textes consultables sur internet, plus d’une cinquantaine relatifs à la psychanalyse écrits depuis 20 ans, et rassemblés à l’adresse (hors Google): https://pierre-boismenu.jimdofree.com

Chaque psychanalyste, à continuer son analyse au delà du terme de la cure, sur le mode que je dirai « transfini », est amené à théoriser un peu sa pratique. Il le fait avec les matériaux dont il dispose et qui sont tels que son histoire particulière, familiale, communautaire, scolaire,  professionnelle, sociale en général, l’a exposé à une acculturation spécifique,  généralement plurielle et entremêlant des éléments plus ou moins hétéroclites. Un peu comme un rêve mobilise des « éléments de la veille » pour figurer ce qui s’y « réalise » de désir refoulé donc aussi bien de censure qui l’y fait méconnaître. Charge à « l’interprétation » d’en extraire le jouir inconscient qui en dernière instance s’y chiffre, lequel jouir est à « déconnaître » au principe du rêver.
Parmi ces données culturelles au sens large que lui donnent par exemple les ethnographes et qui nourrissent la mise en forme du rêver théorisant, il en est de plus élaborées, constituant ce qu’on isole comme « Culture ». Elles peuvent être littéraires, artistiques, religieuses, scientifiques, etc… Elles peuvent être aussi philosophiques, qu’on ait eu ou pas un parcours universitaire s’y référant explicitement.  Les références philosophiques, non exigibles bien sûr, présentent un certain privilège, la philosophie étant moins une discipline spécialisée qu’une discursivité par où la pratique du  penser s’affranchit a priori de cadres prédéterminant son objet et peut prétendre à une universalité au moins virtuelle, c’est-à-dire adressant possiblement ses dits à tout un chacun qui s’aventure à penser, même « comme ça,  pour rien ». Lacan ne s’est pas privé de trouver des ressources dans le corpus de multiples philosophes, même et surtout si c’est pour les détourner, parfois violemment, de leur cours académiques et les plier à ses mises en formes théorisantes de l’inconscient freudien. Freud qui se méfiait des philosophes n’en a pas moins fait usage, à commencer par l’enseignement qu’il avait reçu de Brentano, jusqu’à son appui sur Empédocle pour penser le pulsionnel… Christian Fierens aussi va se ressourcer en philosophie, mais en l’occurrence il a recours à un philosophe, Kant, celui plus précisément de la Critique de la raison pratique, qui est moins convoqué usuellement dans notre milieu que d’autres (comme Hegel, Heidegger, Kierkegaard, Aristote, etc…), même si Lacan dans le séminaire VII sur l’éthique y fait fortement référence et insiste, assez en vain semble-t-il, pour que les auditeurs de son séminaire aillent vraiment la lire, cette Critique, qui il est vrai n’est pas réputée pour être drôle à lire.
Or, Christian Fierens, non seulement emboîte le pas du séminaire 7 en relisant vraiment Kant,  mais il déborde résolument la lecture de Lacan lui-même qui, tout en soulignant combien l’élaboration kantienne fait rupture avec tout ce qui s’était dit jusqu’ici en termes de morale et dégage donc la voie vers la nouvelle approche de l’éthique qu’il entend élaborer pour la pratique analytique, ne s’en retourne pas moins contre lui pour en pointer ce qu’il considère comme de graves insuffisances. Au point qu’il en écrit Kant avec Sade, texte contemporain du séminaire VII, et mène un combat contre lui en s’armant de la kalachnikov sadienne jusqu’à faire de la provocation sadienne la « vérité » du texte kantien… Quoique qu’il reconnaisse que Sade n’anticipe pas pour autant Freud dont la découverte de l’instance de l’inconscient reste à venir et qu’il s’enferre dans des limites  fantasmatiques conduisant à une impasse érotique. Il s’agit donc de relire aussi ce « casse-texte » labyrinthique que constitue Kant avec Sade, qui a pu, parmi d’autres textes lacaniens et presqu’autant que L’étourdit de 73, nous donner beaucoup de fil à retordre, à en perdre même ce fil.  C’est précisément ce fil que nous donne la lecture autant courageuse que patiente de Christian Fierens en Ariane libérant Thésée du labyrinthe, ce fil du discours qui à la fois rend justice à  un Kant malmené et élucide la stratégie contournée de Lacan usant de Sade pour ruser la raison kantienne et nous amener, avec C.Fierens et à partir de la découverte freudienne du désir refoulé, à reformuler l’impératif catégorique de la Morale en principe de jouissance au ressort de l’inconscient et refondant son statut éthique.
On mesurera d’abord le véritable coup de force dans la pensée que Christian Fierens effectue si l’on s’en tient au plus simple énoncé qui condenserait l’opération : ce que Kant appelle le devoir moral, la Loi qui enjoint inconditionnellement de faire ce qui est à faire pour nulle autre raison que s’en faire « digne », n’est autre que ce que la psychanalyse reconnait comme la jouissance, l’impératif « jouis » comme Lacan dans Encore le conjuguera en y reconnaissant le Surmoi, et que Christian Fierens propose d’élever au principe de l’inconscient, au ressort en dernière instance du désir, à son « essence » que Kant nomme « la faculté de désirer supérieure ». Ce que nous pourrions traduire dans notre lalangue déphilosophisée son « réel », à savoir ce d’où s’oriente la détermination d’un sujet à « ne pas céder sur son désir », même et surtout si ce n’est pas « humainement » possible voire souhaitable. Comment supporter la violence a priori de cette équivalence en court-circuit « devoir=jouissance » ? Il y faut bien, pour en renouer un à un tous les chainons qui les relie, les 268 pages du livre dont nous ne dispenserons ici nul lecteur d’en lire lui-même le déroulé rigoureux.
Comment entendre cette « équivalence » ? Le texte laisse flotter le lecteur entre identité, analogie, métaphore… au gré de son jugement du moment. A raison sans doute, car ce n’est pas la logique au ressort de l’entendement qui peut trancher en la matière ; si raison il y a ici elle ne peut être que dialectique (au sens kantien justement) qui ne traite pas des énoncés sans prendre en compte les modalités d’énonciation et sans passer par des « chicanes » imprévisibles a priori, le dire «  tordu » de Sade par exemple, où se dérobe tout sol dans des moments d’indécidabilité. On ne sort pas du labyrinthe en ligne droite. Le terme de « traduction » que j’ai avancé, serait peut-être moins inadéquat, qui travaille dans la matière de langue dont l’opacité intrinsèque ne se laisse pas réduire au tableau logique : on le sait bien, et W. Benjamin en particulier l’a décisivement mis en lumière (La tâche du traducteur), que traduire une langue source dans une langue-cible ne va pas sans produire un reste intraduisible qui précisément en relance l’effort pour traduire encore à nouveau, rater encore, en reprendre  le chemin. On ne passera pas de l’un à l’autre, du devoir à la jouissance, par un clic algorithmique, mais en refaisant le chemin qui fait du livre non une Théorie valant système mais un mouvement de théorisation qui n’aura de lecteur qu’à ce qu’il en relance la mouvance d’une nouvelle « enformation ». Il lui appartient de le mettre à l’œuvre de sa propre lecture. Ce texte même que vous lisez est ma lecture de la lecture que fait Christian Fierens de la lecture qu’effectue Lacan de Kant et Sade… A vos lectures, comme on dit à vos souhaits…
Selon une étymologie, lire c’est recueillir. La lecture de Christian Fierens recueille ce qu’on pourrait appeler « l’effet kantique » en psychanalyse – pour sa pratique de l’inconscient certes ignorée de Kant mais qui est indissociable de son éthique qui elle ne peut ignorer Kant.
Chez le philosophe, la « bonne volonté », celle qui mérite d’être tenue pour vraiment morale, n’est en aucun cas assimilable à un « vouloir le Bien », a fortiori « un bien ». Elle rompt, comme l’a salué Lacan dans son séminaire, avec ce que celui-ci a appelé sarcastiquement « service des biens ». En effet, ce qui « oblige » absolument un sujet, ce que Kant nomme « l’impératif catégorique », n’est déterminé par nul objet, nul objectif , ou a fortiori nul « projet » (comme le discours dominant actuel nous le serine). Il est déterminé par rien sinon le pur respect de son commandement formel, même et surtout s’il s’éprouve comme culpabilité à ne pouvoir « humainement » y souscrire, ce qui en est l’expérience princeps, et qui peut s’apparenter au Surmoi. Un point décisif pour ne pas méconnaitre l’apport kantien et que C.Fierens élucide dans la première partie de son livre, tient à l’équivoque de ce qui se qualifie de « formel », entre son acception logicienne de maxime formalisée, et son sens prescriptif de ce qui ne se discute pas (inconditionnel). Les deux valent pour Kant. Mais le premier sens, qui est formulé dans le livre « pédagogique » qu’est Fondement de la métaphysique des mœurs et qui est retenu exclusivement par la plupart  des lectures, n’est qu’une condition nécessaire, sine qua non : à savoir que ce qui fait loi morale au sujet (à l’être de raison en termes kantiens) ne tient à rien d’autre qu’à la forme même de la Loi, valant donc universellement, puisqu’elle ne dépend d’aucun « contenu ». Mais elle n’est pas suffisante pour être dite morale et donc obliger le sujet : dans la Critique de la raison pratique, ce que C.Fierens ne cesse de souligner contre Lacan qui l’a méconnu,  c’est que ce n’est pas la logique de l’énoncé (dite analytique en termes kantiens) qui fait loi, même s’il lui est ainsi donné forme, c’est celle de l’énonciation (dite synthétique par Kant, ce qui est « à faire »). Et ce qui est alors en cause, ce n’est pas un concept de l’entendement (y compris et surtout celui du bien) mais un principe de la « raison pure pratique ».
Principe, comme quand on dit « je le fais par principe » (et non pour telle ou telle raison), c’est le terme essentiel retenu par l’auteur, apte à faire  pivot entre le principe moral et le principe de jouissance. Le terme est déjà d’usage en psychanalyse avec le principe de plaisir/principe de réalité que Freud a mis à jour dans le réglage de l’appareil psychique, et surtout en 1915 son au-delà, « au-delà du principe de plaisir », associé à la « pulsion de mort » mais non élevée au rang d’un principe. Ce que fera précisément C.Fierens, et c’est tout l’enjeu de ce livre qui offre par là un renouveau de la théorisation de l’inconscient, et partant, de sa pratique et de l’éthique de l’analyse.
Quelle portée a donc  le fait de porter à la dignité de « principe » l’au-delà du principe de plaisir ? Celle de prendre résolument en compte l’introduction lacanienne du réel de la jouissance, mais à condition de ne pas entendre « jouissance » ni comme un « concept » qui saisirait ontologiquement une « substance », ni comme une « origine » qui situerait mythiquement une donnée originelle d’où émergerait l’humain, mais éthiquement comme le verbe « jouir » qui ne se donne au sujet qu’à l’impératif « jouis » où Lacan reconnait l’impératif surmoïque. Sauf que ce surmoi ne se réduit pas, comme dans la vulgate analytique, à une censure qui contraindrait le principe de plaisir à en rabattre sur l’hybris toujours possible, au nom de la finitude : soit le « principe de réalité » qui est complémentaire du principe de plaisir/déplaisir et alimente toutes les conduites ordinaires, sous couvert de pragmatisme ou de moralisme, depuis une simple « civilité » socialement déterminée jusqu’à de rigoureux commandements divins religieusement révélés. Il y a certes de telles « lois » qui régulent le désir au jour le jour, il n’y a même que ça… sauf  ce dont l’effet surmoïque peut être un indice, une force de Loi intrinsèque au désir même et supplémentaire au principe de plaisir, qui en assure « l’indestructibilité ». Kant en sa langue philosophique la nomme « faculté supérieure de désirer », et on peut rapprocher de ce que Lacan appelle « le désir, ce qu’on appelle désir, et qui suffit à ce que la vie n’ait pas de sens à faire un lâche ».
Depuis « l’au-delà du principe de plaisir» freudien, les psychanalystes se sont employés à s’y aventurer, « au-delà ». A commencer par Lacan s’efforçant à un « pas au-delà de la castration » pour rendre compte des « fins de l’analyse », et disant en 1976, se référant sans doute à sa pratique des nœuds :   « J’ai essayé quelque chose qui va plus loin que l’inconscient ». Ou Alain Didier Weil à sa suite poussant le pas au-delà jusqu’au saut dans « un mystère plus lointain que l’inconscient ». L’enjeu clinique de ces théorisations risquées est, me semble-t-il, d’envisager des « moments de conclure » qui rendent possible de se déprendre du strict déterminisme de l’inconscient freudien, de l’incidence destinale des traces de son histoire voire de sa préhistoire qui l’auront marqué à jamais et insistent dans « la mémoire de ce qui est oublié », à savoir refoulé, et que leur avération partielle dans la cure ne suffit pas à l’en affranchir pour qu’il parvienne à sa destination de sujet au désir par delà le destin qui le fait juste être là. Finalement l’enjeu est celui de ce que les philosophes appellent liberté, question épineuse s’il en est mais que la pratique analytique ne peut éviter de « toucher », même et surtout s’il n’est pas question pour nous d’en arrêter un concept. C’est en tout cas ce que Kant à sa manière met en cause, en termes de « cause libre » du désir « supérieur » qui se manifeste  par la volonté morale. Paradoxalement car il s’agit d’un faire Loi inconditionnel dont il affirme l’autonomie – autonomie qui n’est justement pas celle du moi qu’elle oblige mais de la Loi elle-même du désir « pur » (comme le qualifie Lacan dans le séminaire VII) d’où il se tient.
Soit : il y a lieu de considérer un au-delà du désir refoulé et des lois moralisantes ou simplement techniques qui en régulent l’effectivité, mais est-ce pour autant un au-delà de l’inconscient ? Faut-il supposer une instance mystérieuse plus fondamentale ou originaire, à connotation divine ou du moins transcendante qui autoriserait en dernière instance cette « liberté » ? Ce serait sans doute souhaitable, et Kant lui-même dans un deuxième temps, en l’occurrence dans la partie qu’il appelle « dialectique » de son livre, en suppose la fiction. Mais il me semble, c’est ma lecture et je la mets en partage, que C. Fierens ne répond pas comme Alain Didier Weil à leur même question fondamentale. Car pour lui, c’est l’inconscient lui-même qui est son plus « lointain », plus lointain que l’inconscient défini par le refoulement, ses investissements et contre-investissements : c’est l’inconscient ramené à sa source. Et cette « source », c’est le jouir de l’inconscient à l’œuvre. Inconscient non pas considéré dans ses formations qui sont le résultat de son chiffrage et qui s’offrent alors au déchiffrage, mais dans son faire, son travail incessant de « donner une autre forme (umformem) » (« autre » est ici le terme essentiel, autre toujours autre) comme l’a intuitionné  Freud qui dit aussi que « l’inconscient ne pense, ne calcule, ne juge absolument pas » : il « enforme », pour reprendre le terme à Jean Oury, comme en témoigne par exemple l’enformation des rêves toujours imprévisibles voire improbables. On ne « sort » donc pas de l’inconscient, et il n’y a pas de mystère à découvrir fût-ce en vain. Il s’agit de ce qu’on peut appeler le « réel de l’inconscient » qui fonctionne comme une relance du mouvement qui nous échappe absolument, non pas à cause de notre supposée finitude au regard d’une puissance infinie, mais parce que LA jouissance n’existe pas, sinon à en reconnaitre le principe : une source n’a lieu, pour qui y « remonte » qu’à trouver ce qui s’éloigne de la source, un jaillissement.
Elever le jouir à la dignité de principe, c’est donc tout le contraire de supposer un savoir, même et surtout inouï ou inaccessible. C’est prendre acte du trou dans le savoir  qui fait que désirer c’est ne pas savoir ce qu’on désire, sinon qu’on peut désirer … de l’Autre. Son statut n’est ni de logique qu’il met à mal, ni ontologique puisqu’il n’y a pas d’être de la jouissance, ni épistémologique  car il ne se connait pas, ni même esthétique étant sans objet. Il est strictement pratique, au sens de Kant, c’est-à-dire éthique, à faire advenir : « Le vrai principe de la moralité et de l’inconscient n’est pas un principe sinon celui d’échapper à tout principe pré-déterminé », énonce en un condensé saisissant C.Fierens à la dernière page du livre.
L’éthique de l’analyse qui en oriente la pratique ne vise aucune fin, bien-être ou Bien, Wohl ou Gute,  qui assurerait d’être enfin « analysé » ! Au plus loin d’une « obligation de résultat », il s’agit d’amener un sujet à se faire l’obligé de ce qui fait Loi du désir, qu’il en vienne à l’y ressourcer au jouir de l’insu, en prenne acte comme principe, ou, dans des termes qui me reviennent, à se faire sujet au réel de l’inconscient, par delà (plutôt que « au-delà ») de déchiffrer ce qu’il peut de la textualité refoulée au sujet de son inconscient. Le premier moment d’une cure qui s’efforce de mettre à jour frisant ce qui du désir aura été refoulé n’est certes pas négligeable s’il permet au sujet plus de mobilité dans ses symptômes, et s’il en est content tant mieux, comme le disait Lacan à Yale. Mais l’analyse peut ne pas s’arrêter là et l’amener à se tenir dans l’ouvert, disponible à ce qui arrive, analysant au-delà de la cure et tenant d’un  « désir, ce qui s’appelle désir ».
« Se tenir dans l’ouvert », disions-nous, de ce « rien radical » que C.Fierens rapproche du nihil négativum kantien, et qui en dernière instance nous détermine en rien sinon, en en prenant acte, se résoudre à « faire ». Mais il ne va pas sans se manifester dans l’existence. En l’occurrence, il s’agit de l’objet a inventé par Lacan, cet étrange « objet-non-objet », mais privilégié spécifiquement comme objet vocal. Chez Kant, la Loi morale qui s’impose de tout ailleurs (qu’il appelle supra-sensible ou nouménal) que du monde phénoménal prend effet dans ce qu’il nomme « voix de la conscience ». Reprenant de Lacan sa quatrième mouture « corporelle » de l’objet a, C.Fierens en fait l’opérateur du retournement attendu d’une analyse poussée jusqu’à une « guérison » qui ne serait pas que thérapeutique mais « guérison analytique », pour le dire à la façon d’Olivier Grignon. C’est un des points décisifs travaillé dans ce livre et qu’on laissera au lecteur le soin de découvrir.
Une autre question qui se pose, essentielle dans ce livre et qui constitue le corps de l’ouvrage, est celle de saisir pourquoi Lacan en est passé  par le sombre éblouissement de l’antre sadienne, au prix d’une double mécompréhension, et sur le texte Kantien et sur le texte sadien. Et pourquoi le suivre dans ce parcours complexe et sinueux, pourquoi est-ce nécessaire ? Je me contenterai d’indiquer d’une part que c’est dans Sade que Lacan aura trouvé la mention de la jouissance qui n’est pas dans Kant, même si le « désir de jouir » sadien n’a rien à voir avec la jouissance au principe du désir (« supérieur ») et qu’il ne s’agit que du principe de plaisir débridé ; et d’autre part qu’il a trouvé dans les mises en scène sadiennes de quoi en expliciter la structure du fantasme qui permet de rendre compte du fonctionnement de l’inconscient en tant que refoulé, laissé par Kant dans l’indétermination de ce qu’il nomme « faculté de désirer inférieure ». Et pour cause, puisqu’on ne saurait lui reprocher de n’avoir pas connu l’inconscient freudien.
Au delà, à vous de plonger dans la lecture.

Pierre Boismenu

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