L’Invité 8 juin 2010

Claude Rabant pour son livre "Métamorphoses de la mélancolie" Préface de Jean Oury Hermann Editeurs – 2010 Présentation Delia Kohen et Jacqueline Massola


Claude Rabant

Un livre, ce soir, de Claude Rabant, après « Délire et théorie », « Clins », « Inventer le réel », la « Métamorphose de la mélancolie ». Un livre qui me laisse pensive, « nachdenklich », songeuse.

Un livre à méditer, un livre par lequel il faut se laisser traverser et dont il faut suivre la progression, le mouvement. Il ne s’agit pas simplement dans ce livre de « métapsychologie » il y a plus et « autre chose ». Il relance et stimule le désir du psychanalyste – un stimulant pour lutter contre la « mélancolisation » du désir.

 

 

 


Delia Kohen

La pulsion du large et « l’Erweiterung » dont il est beaucoup question dans ce livre est à l’œuvre. « Erweiterung », l’élargissement dont Claude Rabant nous parlera certainement tout à l’heure avec cette proposition (p.130) « tout nous conduit à l’idée d’une éthique de la pulsion, qui doit être par définition une éthique de « l’Erweiterung ».
On est engagé dans ce livre à se laisser conduire, faire le voyage avec ses escales chez les philosophes Spinoza, Schopenhauer, Kierkegaard et Nietzsche, les soubassements philosophiques de la pensée de Freud. Ce livre nous laisse dans une curieuse impression de ne plus savoir qui en est le locuteur. Différents champs du savoir se correspondent.
Il aurait fallu certainement plus de temps pour le savourer. C’est un livre qui déplace, qui décentre; aurions-nous vraiment su mieux t’accueillir, Claude Rabant, en repoussant cette invitation à la rentrée d’octobre ? Je ne le crois pas vraiment. C’est pourquoi je suis heureuse de t’accueillir aujourd’hui, heureuse que tu nous fasses l’honneur et l’amitié de commencer ce parcours avec ton livre ici avec nous au salon.
Ce soir nous avons surtout comme tâche d’encourager la lecture de ce livre tout juste paru en librairie. Certainement peu de gens ici en ont encore pris connaissance et pris le temps de le lire.
Ce livre pousse à la lecture. On éprouve un plaisir certain à suivre Claude Rabant dans son ancrage Freudien. Il est arrivé à ce tour de force de ne citer que très peu Lacan, qui pourtant est bien là, dans l’ombre, Freud après Lacan.
Il nous donne aussi l’occasion de redécouvrir Imre Hermann, élève de Freud et Ferenczi de l’école de Budapest. Celui que Freud appelait « mon petit philosophe ». Dans les Inédits et Introuvables de la Revue « Patio » avec Jacques Hassoun, vous y aviez consacré un numéro (« Psychologie de l’antisémitisme » et « la préférence pour les marges en tant que processus primaire »). La revue du Coq Héron y a consacré un numéro, « Imre Hermann et le théorie de l’agrippement ». Dans ce livre, c’est de sa topologie que tu te sers. Nous ne manquerons pas bien sûr de te poser la question de cette préférence.
Il est aussi recommandé de lire ou relire, les Métamorphoses d’Ovide, Kafka et de Dante. Apprendre le Glossaire « mots allemands » et « mots grecs » ne paraît pas superflu, en tout état de cause cela pourrait vous éviter d’avoir à manipuler le livre et perdre le fil de votre lecture. Ce livre nous met au cœur des langues : passer d’une langue à l’autre, ajoute du plaisir à la lecture de ce livre.  
Claude Rabant revient sur la théorie des pulsions avec Freud et sa reprise avec Lacan dans « le démontage des pulsions » (les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse Livre XI).
Il nous annonce dès le début du livre ses directions, ses choix théoriques. Plutôt le rythme et le mouvement que le manque. Un principe dynamique plutôt qu’une structure a priori. La pulsion comme matrice du désir.
« Psyché est étendue, n’en sait rien »: cette réflexion un peu énigmatique de Freud en 1938 sert de guide à ce travail avec tout un développement sur la spatialité et l’extension de l’inconscient. « L’idée du corps présente dans l’esprit, voilà au fond l’inconscient, dans son extension » (p. 43).
« La vie de l’âme. Psyché est corporelle, n’en sait rien » tel était le titre de la communication de Florence Coblence à Athènes, il y a quelque semaines en ouverture au 70ème congrès des psychanalystes de langue française. Coïncidence intéressante pour des psychanalystes qui s’ignorent en principe!
Freud conclut la « Traumdeutung » sur « le désir indestructible ». Ecoutons Claude Rabant, voilà ce qu’il nous en dit « le désir indestructible construit le présent à l’image du passé par un gigantesque retour en arrière dont le terme se trouve, par un effet hyperbolique, situé en même temps dans l’avenir ». Il convient, ce désir, de le suivre à la trace.
C’est aussi un livre qui explore les sources de la créativité avec des pages très fortes sur la « sublimation », le « féminin », plutôt son refus tel que Freud l’énonce dans cette question si souvent débattue, du « roc biologique », dans « analyse finie et infinie » en 1938. Claude Rabant propose un « roc historique ». Il redonne à penser des questions bien d’actualité sur la sexuation.
Un livre du côté de l’ouverture et de l’éthique de l’acte qui cherche plutôt à desserrer les verrous théoriques qui empêchent d’avancer et s’oriente plutôt du côté de ce qui donne de l’air et du souffle à la psychanalyse et à sa pratique.

Delia Kohen

 

 

 


Jacqueline Massola

 

 

 


Elisabeth Naneix-Gailledrat

Laisser un commentaire

Your email address will not be published.