François Jullien Pourquoi il ne faut plus dire «je t’aime»

Dialogue avec Nicolas Truong Coédition Le Monde/L’Aube, 2019

 

Thierry van Eyll,

A aussi travaillé pour des théâtres, publie des articles et des récits. Des articles à des sujets aussi divers que la littérature, la philosophie, le théâtre, le cinéma, la compétition automobile, les voyages. Certains de ses récits ont été portés à la scène (théâtre et comédie musicale).

« J’aime rencontrer ce qui n’est pas moi » : ainsi pourrait se résumer le livre qui a pour titre Pourquoi il ne faut plus dire « je t’aime »
Il est l’œuvre de trois personnes : François Jullien, le philosophe, Nicolas Truong, le chroniqueur qui l’interroge, et Pascal Lemaître l’auteur des dessins.
François Jullien est un philosophe qui explore autant du côté de la culture chinoise que dans la philosophie grecque et chez des penseurs chrétiens.
Comment parler de l’amour, comment exprimer l’amour ? Et surtout, comment le prolonger ?
Il y a l’amour qui tourne mal, ou même fait mal, et plus rare, l’amour qui se prolonge bien.
L’amoureux souvent se veut surtout conquérant, et quand il a conquis, devient possessif. L’autre devient l’objet de son amour. La relation devient une relation de rapports de force.
Il ne resterait alors que deux solutions. Supporter cet amour malheureux, ou rompre.
Pourtant, tout avait commencé par une bonne rencontre. Si la rencontre n’avait pas plu, personne n’aurait tenté de la prolonger. Comment passer de la bonne rencontre à la bonne durée ?
Plutôt que d’employer le terme amour, galvaudé par les médias, François Jullien préfère parler d’intimité et de seconde vie.
Les amants veulent la fusion. Les intimes ne cherchent pas à s’assimiler l’un l’autre. Aimer l’autre comme moi-même n’est pas un mauvais précepte, à condition de ne pas vouloir rendre l’autre identique à moi-même. Pour partager, pour échanger, il faut maintenir des écarts et des égards. L’autre doit rester un autre, son altérité doit être préservée.
Cela implique et permet de passer à une seconde vie, non par une rupture, mais par une transition. Par de petits décalages nous désinvestissons ce qui nous perturbait, et nous nous en détachons. En même temps nous prenons des initiatives dont nous ne savions pas capables. Il ne s’agit pas d’un changement théâtral, mais d’un cheminement.
Les illustrations de Pourquoi il ne faut plus dire « je t’aime » sont des illustrations libres : à leur sujet François Jullien et Pascal Lemaître ne se sont pas concertés. Le dessinateur ajoute d’une manière personnelle de l’humour et de la tendresse.
La délicatesse et la lucidité sont elles aussi présentes dans ce livre. Il n’impose rien ni ne prétend apporter une solution facile. La seconde vie de l’amour n’est pas garantie : soit on y accède, soit on passe à côté.

Thierry van Eyll

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