Olivier Douville

"Chronologie de la Psychanalyse du temps de Freud" (1856-1939) Editions Dunod, Paris

Robert Samacher, Psychanalyste, membre de l’Ecole Freudienne, ex-maître de conférences à l’Université Paris-Diderot (Paris 7).
Dernières publications : Participation à l’ouvrage Ella Sharpe lue par Lacan sous la direction de M.L. Lauth, Paris, Editions Hermann, 2007. – « Le corps des déportés et le Yiddish » dans Yiddishkeyt et psychanalyse, sous la direction de Max Kohn, Paris, MJW Fédition, 2007. – « Humour juif et mélancolie », dans « Culture yiddish et inconscient », sous la direction de Max Kohn, revue Langage et inconscient, revue internationale, Limoges, Editions Lambert-Lucas, 2007. –  » Les progrès de la science jusqu’où ? » sous la direction de Robert Samacher, Emile Jalley, Olivier Douville, revue Psychologie Clinique n° 23, Paris, L’Harmattan, printemps 2007.

Robert Samacher a lu « Chronologie de la psychanalyse du temps de Freud »

Dans ce livre, Olivier Douville met en perspective les grandes dates de la diffusion de la psychanalyse dans le monde du temps de la vie de Freud.
Son projet de départ, était d’analyser la situation des revues de psychanalyse dans le monde en prenant appui sur l’histoire des conditions de diffusion de la psychanalyse.

Il a constaté qu’elle s’était rapidement fait connaître dans le monde européen, américain et dans de larges pans du continent asiatique en même temps qu’elle a suscité de nombreuses résistances en rapport avec l’idée freudienne du sens sexuel inconscient du symptôme.
Le repérage historique que propose l’auteur ne fait pas l’impasse sur la solitude de Freud qui voit après un temps d’enthousiasme, nombre de ses condisciples retomber dans l’ornière de l’occultisme ou de l’idée la symétrie des sexes. Il trouvera néanmoins un compagnonnage intellectuel auprès de Sandor Ferenczi et Lou Andréas-Salomé.

L’auteur rend compte également des problèmes institutionnels dans lesquels sont pris les psychanalystes, les rapports de pouvoir avec la mise en place de l’I.P.A., il ne sous-estime pas les problèmes groupaux qui traversent le mouvement psychanalytique et qui varient d’un pays à l’autre. Ainsi l’histoire du mouvement psychanalytique est tributaire d’une « psycho-géographie » qui fait écho aux différents modes de diffusion mondiale de la psychanalyse.

Douville remarque que « sur la scène internationale, il s’est rarement fait de grands mouvements d’émancipation intellectuelle qui n’aient invoqué Freud », d’après moi, au même titre que Marx. Il rappelle qu’en Chine,  le mouvement de mai 1919 est à cet égard frappant. L’intellectuel Zhang Dongsun repéra finement certaines thèses de Freud. L’exemple de Trotski est aussi notable.

A la même époque, la pénétration de la psychanalyse s’était faite en Iran qui était alors dans une quête de rationalité issue des Lumières.
L’auteur rappelle aussi d’autres modes d’introduction de la psychanalyse : Ce sont des penseurs et des praticiens du soin éducatif qui, le plus souvent, se sont penchés sur le versant pédagogique de la pensée freudienne, en particulier en Russie et en Grèce. Le surréalisme s’est aussi voulu en dialogue avec le freudisme. Contrairement à certaines idées reçues, dès la fin du XIXe siècle, des neurologues et des aliénistes chroniquèrent des textes de Freud. Dès 1919, Jean Piaget fit, d’une façon habile et avertie, une présentation des thèses de Freud.

Ainsi la colonne vertébrale de ce livre est bien la diffusion de la psychanalyse du temps de Freud. Il propose différentes perspectives de lecture et comme le rappelle l’auteur, il fait des « incursions régulières dans le monde des idées », il rend compte du « vif des révolutions politiques, intellectuelles et artistiques ».

Douville rappelle que si la psychanalyse dialogue avec la culture, c’est « au nom d’une théorie du collectif au singulier, du lien conflictuel entre travail du symptôme, travail de la culture et malaise dans la civilisation ». La psychanalyse ne peut se prêter aux mythes collectifs inentamables (l’inconscient collectif de Jung) qui participent à la manipulation des masses tels qu’on a pu le constater avec le nazisme.

D’ailleurs cette idéologie provocatrice de guerre fera de nouveau de l’histoire de la psychanalyse, une histoire d’exilés et de réfugiés : la psychanalyse vient de l’exil et c’est aussi par des migrations dans les langues qu’elle se fera connaître d’un pays à l’autre.
L’auteur établit donc des comparaisons concernant le mode pénétration  et de diffusion d’un pays à l’autre.

La vocation de ce livre est d’être un ouvrage de référence qui retrace la chronologie de l’histoire de la diffusion de la psychanalyse dans le monde du temps de Freud, ce qui lui donne la dimension d’un outil de travail précieux auquel le chercheur peut se référer et que l’on peut consulter au même titre qu’une encyclopédie.

Les index des auteurs et des pays rendent bien compte de la conjugaison dans le temps et dans l’espace des différents modes de diffusion des idées véhiculées par la psychanalyse proposant parallèlement diverses perspectives de lecture. Il est illustré par des citations qui sont bienvenues et qui renforcent la compréhension des avancées de la psychanalyse dans le monde.

Robert Samacher

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