L’ouvrage rassemble une série d’articles qui se posent la question de la place de la topologie de Lacan dans le rapport à la pratique. Et je ne pourrais rien dire de mieux que le premier article de Jean-Pierre Cléro qui ouvre l’ouvrage. Il a fait un travail de synthèse remarquable de l’ensemble assez disparaitre des contributions, les ramenant à leur choix spécifique dans l’histoire de la topologie mathématique.
Ils sont tous à leur manière intéressants, voire passionnants : sur l’anorexie et la bouteille de Klein (Flavia Goian) sur le miroir et question de l’espace « muni de l’Autre »( Roland Meyer) sur le « flux signifiant (René Lew) et quelquefois la topologie n’y joue qu’un rôle assez subsidiaire : par exemple dans l’article de Elisabeth de Francesci, sur la question de l’éthique : « la topologie n’est peut-être qu’un moment et un moment subsidiaire dans notre manière de concevoir le déroulement d’une cure et le rôle que nous pouvons y jouer ? Rien n’est moins sûr, en effet comme nous l’avons vu précédemment, il ne s’agit pas de fonctionner sur le mode d’une alternative exclusive, mais plutôt sur celui d’une alternative inclusive » (p162) ou « la topologie ne saurait être qu’un moyen et un moyen secondaire, non une fin ». J’en suis bien convaincue.
Une notation quand même pour le deuxième article et dernier de l’ouvrage, de Jean-Pierre Cléro qui traque autour des passions en philosophie, ce qui serait une topologie chez Aristote, Hume et Bentham. Quelquefois pour moi, les liens sont assez tirés par les cheveux : on a la sensation qu’il tient à ce que soit réduite la nouveauté de la topologie de Lacan ! Dans ce cadre, il propose le texte de Bentham en anglais et sa traduction (première) de « axiomes de pathologie mentale » tout à fait intéressant !
Mais j’ai quand même du mal à voir ce livre ce finir avec Michel Henry et des citations de son livre « généalogie de la psychanalyse » qui est un refus consistant de la méthode freudienne, voire méprisant, et qui se solde par un recours à la « philosophie asiatique » du « souffle ». Entre l’objet a, coincé entre les trois consistances, réel, symbolique et imaginaire, entre le fantasme comme cadre de la réalité psychique, (métaphore ou catachrèse ?) et le « souffle » mon cœur ne balance pas !
Jeanne Lafont
Psychanalyste, psychothérapeute. Mes livres : Chez Point hors ligne, Topologie ordinaire de Jacques Lacan, 1986; Topologie lacanienne et clinique analytique, 1990. Les pratiques sociales en dette de la psychanalyse, 1994. Chez EFEdition. Les dessins des enfants qui commencent à parler, 2001; Six pratiques sociales, (livre collectif), 2006; La langue comme espace, 2015